Entre Diourbel(Sénégal) sa terre natale et Bordeaux(France) sa terre d’accueil, l’artiste Boda Line a toujours exprimé ses ressentis avec des notes de musique. Ses joies, ses peines, ses victoires, ses échecs, ses inquiétudes ainsi que son espoir, se lisent à travers les différents titres qu’il a produits. « TOUKI », son dernier single, sorti le 05/01/ 2024, ne déroge pas à la règle. Dans cette interview accordée à l’animateur Dj Tafe, l’artiste lève le voile sur un sujet sensible qui est le sentiment de « redevabilité » financière que vivent pratiquement tous les émigrés.
DjTafe: Bonjour Boda Line
Boda Line: Bonjour, mon frère. Je vais super bien. Merci
DT : Ton dernier single s’appelle « Touki ». Qu’est-ce que ce titre évoque pour toi ?
BL : c’est un titre qui met l’accent sur une situation délicate et que vivent presque tous les africains de la diaspora. Ce n’est pas évident d’être confronté à deux modes de vie différents, a deux cultures distinctes, et de devoir ainsi trouver le juste équilibre. Il arrive de subir des abus, de se sentir incompris et parfois rejeté. Par moments, tu es marqué par les remords de manquer à des évènements importants de la vie, de vivre loin de son conjoint(e) et de ses enfants, sans voir ces derniers grandir. A cela s’ajoute la redevabilité financière envers tous les membres de la famille restés au pays, et qui oublient souvent de te demander si tu te sens bien ou pas.
DT : Pourquoi le choix de Cheikh Guissé en featuring sur ce titre ?
BL : Tout d’abord, il faut savoir que Cheikh Guissé est un artiste de renommée internationale qui connait mieux que quiconque cette situation. Parce que tout simplement, ses multiples voyages à travers le monde, lui ont permis de cerner cette réalité. Mais aussi, il peut en être un témoin de plus.
DT : Comment s’est faite la connexion?
BL : tout naturellement. C’est un grand frère hyper cool et sympa, très ouvert d’esprit, avec qui on peut bosser facilement, dans une bonne ambiance. Nous avons un ami commun ici à Bordeaux. On se croise souvent chez lui. Quand on a échangé sur le thème, il était super intéressé. Tout comme moi, il était content de communiquer sur cette situation que nous avons vécu tous les deux, et que nous partageons avec beaucoup d’autres compatriotes.
DT : Existe-t-il une anecdote relative au titre et dont tu voudrais partager avec nous ?
BL : Tu sais les exemples sont toujours là, nombreux autour de nous. C’est presque une culture chez les africains. Même au pays, nos parents villageois, poussés parfois par l’exode rural vers les grandes villes, sont confrontés à cette même situation. Mais il faut savoir que c’est un sujet qui revient assez souvent dans les débats au sein de la diaspora. Des gens m’ont appelé et m’ont demandé de communiquer vraiment sur ces rapports qui existent entre l’expatrié ou le ressortissant et les siens. Tu sais l’immigration n’est pas une mince affaire. Dommage que les gens ne puissent pas voir souvent le revers de la médaille. Tout émigré a besoin d’un moment ou d’un autre, de ressentir l’affection et la compassion de sa famille et des autres, à travers même de petits messages textes ou vocaux, d’appels téléphoniques, etc. C’est vrai que ça peut être difficile au pays, mais nous aussi, nous avons notre lot de galères à nous. Quelque part, on a juste besoin d’être écouté ou d’être soutenu moralement. Il ne faudrait pas que ça tourne toujours autour de l’argent.
DT : Ce titre annonce-t-il un nouvel album ?
BL : « Touki » sera bien sûr présent dans le prochain album « Rainbow. Mais ce n’est le dernier single avant la sortie. D’autres belles surprises sont gestation. Je demande juste aux fans et aux mélomanes de rester connectés pour la suite.
DT : Est-ce que la date est déjà fixée ?
BL : Si tout se passe comme convenu, il sera disponible cet été.
DT : Cet album à venir s’inscrit-il dans le même registre que les autres albums, ou doit-on s’attendre à un changement de direction ?
BL : il faut s’attendre à une rupture surtout avec le Reggae-danceall afro-jamaicain qu’on a incarné une bonne partie de notre carrière musicale. Rainbow sera une sorte de retour aux sources, car je suis allé puiser dans mes racines africaines énormément d’inspirations. D’ailleurs le wolof, ma langue maternelle, sera en filigrane dans cet album.
DT : Est-ce que des collaborations avec des artistes étrangers sont prévus ?
BL : A part la présence d’un artiste ghanéen Sweat Balrock, les autres featuring sont assurés des sénégalais : Mayna Sourang sur le titre « Yaye » déjà en rotation et Cheikh Guissé, sur ce nouveau single. Aussi, d’autres collaborations en attente d’être concrétisées.
DT : Quelle est ton actualité musicale Boda Line ?
BL : Qui connait Boda, sait que c’est un artiste qui adore la scène et qui fait assez souvent des performances live. Mais en ce moment, je reste focus sur la promo du single. Pour te dire vrai, j’ai même décliné des propositions de spectacles. Toute mon énergie est mobilisée autour de ce single et de la préparation de l’album « Rainbow »
DT : Comment tu vis la situation politique actuelle de ton pays ?
BL : Mal. Je la vis vraiment mal mon frère. Et comme tout bon sénégalais, je me désole de voir que mon pays, qui était cité comme un exemple de démocratie dans le continent, en soit arrivé là. Je suis avec beaucoup d’intérêt tout ce qui se passe au pays et j’avoue que je suis inquiet. Toutefois, quel que soit le projet politique, le soutien du peuple est plus que nécessaire
DT : Quel est le message que tu voudrais lancer à la population sénégalaise ?
BL : Nous avons été toujours une grande nation. Aujourd’hui le Sénégal est à la croisée des chemins, donc j’en appelle à la responsabilité de tout un chacun. Je prie enfin pour que la démocratie puisse prendre le dessus
DT : A ta famille, tes amis, tes fans, qu’est-ce que tu as envie de leur dire ?
BL : je profite de cette interview pour faire un coucou à toute la famille, les amis et les sympathisants. Je leur merci pour avoir été là depuis le début, et sans relâche. Je vous dis à très bientôt au Sénégal pour la promo de « Rainbow ». Merci à toi aussi pour cet entretien
DT: Boda Line, merci
BL: c’est moi qui te remercie mon frère.
- Se connecter ou s'inscrire pour poster un commentaire